Comme on vous le soulignait le mois dernier, le travail du comité de suivi de l’universitarisation des formations paramédicales et de maïeutique a permis de faire avancer certains dossiers comme l’admission en IFSI dès 2019.
Pour Stéphane Le Bouler, responsable du projet Universitarisation au sein du ministère des Solidarités et de la Santé et du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, nous sommes entrés « dans une phase d’accélération inédite et de concrétisation ».
De quoi parle-t-on quand on parle d’universitarisation ?
C’est tout d’abord un processus qui n’est pas nouveau mais qui a, il est vrai, connu des éclipses, des accélérations, des décélérations… Un véritable « stop and go ». Aujourd’hui, nous sommes clairement dans une phase d’accélération inédite et de concrétisation.
Il s’agit tout bonnement d’ancrer pleinement les formations paramédicales au sein de l’enseignement supérieur et de les rapprocher de l’institution universitaire.
Les finalités de ce processus ne font plus guère débat. Il s’agit de:
- revoir l’approche des métiers pour faire plus de place à la transversalité ;
- développer de nouveaux champs de recherche et, pour ce faire, de recruter des enseignants chercheurs issus des filières paramédicales et de maïeutique ;
- harmoniser les droits des étudiants ;
- s’attacher à une meilleure régulation territoriale.
Face à un processus multiforme et somme toute assez complexe, il est important de se défaire de quelques idées fausses.
- L’universitarisation ne se résume pas à la réingénierie ;
- L’universitarisation ne signifie pas l’augmentation générale de la durée des études ;
- L’universitarisation peut prendre la forme de l’intégration pleine et entière à l’Université mais elle emprunte aussi bien d’autres voies;
- L’universitarisation représente une transformation d’ensemble… mais avec des invariants ou des garde-fous : la présence territoriale des formations, leur caractère professionnalisant, l’ouverture sociale des études, le devenir des équipes pédagogiques actuelles…
Quelle forme prend aujourd’hui l’intégration universitaire sur le terrain ?
Des formes très variées : une meilleure articulation des cursus paramédicaux et universitaires, le développement de partenariats robustes en matière de formation ou de recherche, l’intégration spatiale et/ou le rapprochement des instituts en un même lieu en lien avec l’Université, l’intégration fonctionnelle, sous la forme de « département universitaire » ou sous une autre forme, l’intégration organique, les efforts en vue de faire accéder les formateurs en place au Master et au Doctorat, les efforts particuliers en ce qui concerne les droits concrets des étudiants paramédicaux…
L’universitarisation, ce sont donc des initiatives nationales : en matière d’admission (comme pour les IFSI), d’inscription à l’Université, de qualification des futurs enseignants chercheurs, de diplomation. Mais ce sont aussi des initiatives décentralisées portées par les régions, les Universités, les hôpitaux, les ARS, les opérateurs locaux de formation… L’intégration universitaire doit marcher sur ses deux jambes…
Concrètement, quels sont les avantages de l’universitarisation pour les étudiants infirmiers (et autres paramédicaux) ?
L’universitarisation est faite pour eux, au sens où il s’agit de les insérer pleinement dans l’enseignement supérieur, de leur permettre d’accéder aux mêmes droits concrets (par le biais des universités ou par celui des CROUS), de ménager des parcours d’études plus diversifiés, comme on entend les développer pour tous les 1er cycle aujourd’hui, de leur faire côtoyer au quotidien leurs homologues des autres filières de formation, en santé et hors santé.
Pensez-vous que l’universitarisation va modifier le profil des étudiants?
Quand on modifie les conditions d’admission en insérant les IFSI sur Parcoursup et en supprimant le concours, on se rapproche incontestablement des standards de l’Université. Pour autant, les ministres ont toujours affirmé qu’il n’était pas question de bouleverser le profil des étudiants admis et que tout serait fait pour préserver la diversité, une des richesses de cette formation. Quand on inscrit les étudiants paramédicaux à l’Université, on ne modifie pas leur profil, on s’efforce de normaliser leur situation en termes de droits sociaux.
Quelles sont les conditions pour arriver à mettre en place une véritable collaboration entre les universités et les IFSI? Quel rôle doit avoir chacun des acteurs?
On peut espérer que demain, quand les équipes pédagogiques auront partout l’opportunité de travailler ensemble, quand les étudiants des différentes formations partageront davantage de cours et de moments de formation, les préventions de part et d’autre tomberont vraiment.
Un des principaux problèmes auxquels on fait face est en effet que les gens, fondamentalement, ne se connaissent guère entre les différents milieux.
Les règles de l’Université sont méconnues en dehors d’elle. Le fonctionnement des instituts l’est tout autant. Les conditions à mettre en œuvre, c’est donc d’abord de faire tomber les barrières pour que les gens prennent l’habitude de travailler ensemble.
C’est ensuite de prendre des initiatives structurantes au plan national : c’est ce que nous avons fait en matière d’admission, de qualification, d’inscription, demain d’évaluation. C’est enfin de faire confiance aux acteurs du territoire, impulser ce qui doit l’être, apporter du conseil, faire jouer l’émulation…
C’est ce que nous allons bâtir à travers un dispositif souple d’accompagnement des projets.