Suite aux critiques de la Cour des comptes, le Premier ministre a rappelé que les 30 CHU français devaient également offrir une activité de soins de proximité, une nécessité pour la formation des soignants.
Dans sa réponse à la Cour des comptes, Edouard Philippe s’est employé à donner une vision précise de la place des 30 centres hospitaliers universitaires (CHU) dans le paysage français. Après deux rapports successifs en 2018, les Sages de la rue Cambon viennent en effet de remettre au gouvernement un référé consacré à l’activité de soins et au rôle des CHU dans lequel ils formulent des recommandations pour une réforme urgente. Car selon eux, le modèle des CHU est « en voie d’essoufflement ».
La Cour recommande une dizaine de « réseaux de CHU » pour renforcer la coordination avec les autres établissements de santé. Actuellement, seuls une dizaine de CHU présentent une spécificité, tandis que d’autres ont une activité proche d’établissements non universitaires, constate-t-elle. L’activité de recherche est concentrée dans les plus grands CHU, tout comme le taux d’encadrement des étudiants par médecin enseignant.
S’agissant de la formation, le rôle des CHU a été renforcé au cours de la période récente par « la généralisation de l’internat et le renforcement de la dimension pratique des apprentissages », note la Cour. La suppression du numerus clausus permettra-t-elle de réduire la « forte inégalité des chances d’accès aux études de médecine » selon les régions ? La réponse est difficile à anticiper, estiment les Sages. Au total, le système actuel est « morcelé et caractérisé par de fortes inégalités de moyens, ce qui compromet l’homogénéité des formations », concluent-ils.
Mais pour le Premier ministre, les CHU « ont vocation à exercer des activités d’expertise et de recours mais également à offrir une activité de soins de proximité », cette activité étant « nécessaire pour la formation des jeunes médecins ». Les CHU doivent contribuer à l’organisation territoriale des soins de proximité. Toutefois le chef du gouvernement prévoit une évolution de la gradation des activités de soins suivant les territoires qui conduira à positionner les CHU « alternativement comme acteurs de proximité, de recours ou de référence ». S’il se dit confiant face à l’évolution de l’organisation des CHU en réseau entre eux, Edouard Philippe estime cependant nécessaire que les CHU « impulsent plus encore qu’aujourd’hui une dynamique médicale » et construisent « des projets communs, tant sur le plan hospitalier qu’universitaire, avec les acteurs du territoire ».
Concernant l’attractivité des carrières hospitalo-univeritaires, plutôt qu’une extrême sélectivité de l’épreuve de titres imposée aux candidats, le Premier ministre retient, comme la Cour, le principe d’une contractualisation par séquence triennale ou quinquennale. Elle traduit une « orientation pertinente car porteuse d’une meilleure lisibilité des missions assumées et d’un accompagnement de carrière davantage personnalisé ». Cette contractualisation de missions pourrait être utilisé à l’appui de la gestion des carrières par les sections santé du Conseil national des universités (CNU), suggère-t-il.
Sur la situation financière des CHU, Edouard Philippe confirme la situation déficitaire mais « il est de 292 et non de 405 millions d’euros », précise-t-il. A l’exception de l’AP-HP qui représente un poids important dans ce déficit, les CHU connaissent un niveau de déficit moins prononcé que celui des centres hospitaliers non universitaires et 16 CHU sont en excédent en 2017. En réponse à la Cour qui recommande de revoir les modalités d’allocation des crédits MERRI (Missions d’enseignement, de recherche, de rôle de référence et d’innovation) pour éviter le saupoudrage, Edouard Philippe indique qu’un groupe de travail travaille actuellement dessus. « De manière plus générale, le financement de la recherche doit être repensé pour plus de cohérence et de pertinence sur les projets ambitieux et innovants », convient-il. Il annonce à cet égard la mise en place d’une coordination nationale articulant les différents mécanismes de financement sur des thématiques prioritaires comme celle de l’antibiorésistance.
Dans un communiqué, les conférences des directeurs généraux de CHU, des présidents de commission médicale d’établissement (CME) et des doyens des faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie « saluent » la réponse apportée par Edouard Philippe à la Cour des comptes. Ils y voient ainsi la confirmation que « leurs établissements ne peuvent être réduits à des centres d’ultra-recours spécialisés et qu’ils ont vocation à exercer non seulement des missions d’expertise et de recours mais aussi des activités de proximité ». Les CHU jouent même « un rôle fort d’animation de filières de soins et d’enseignement et de réseaux de recherche en lien avec tous les acteurs du territoire », soulignent-ils.