La grève prendra-t-elle fin avant l’été, comme l’espère la ministre de la Santé ? Annoncées par Agnès Buzyn à la mi-juin, les « premières mesures de soutien » en faveur des personnels non médicaux des urgences commencent à prendre forme.
Titulaires ou contractuels, près de 30 000 agents de la fonction publique hospitalière vont désormais percevoir une prime individuelle de 100 euros net*, en raison de leur « exposition à des risques particuliers » et de leurs « conditions de travail spécifiques ». Effective au 1er juillet, elle pourra être versée rétroactivement. Autre avancée notable, elle pourra être cumulée avec l’indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants. Chose impossible jusqu’alors…
Une réforme controversée
Dans un second décret thématique**, le gouvernement propose un cadre d’exercice rénové pour les infirmiers de bloc opératoire diplômés d’Etat (IBODE). Faute de personnels formés en nombre suffisant, l’entrée en vigueur de trois actes exclusifs (aide à l’exposition, hémostase et aspiration) a été reportée de six mois, soit au 1er janvier 2020. Particulièrement attendue, la mise en place d’un dispositif transitoire a également été officialisée. Les infirmiers non spécialisés qui exercent au bloc opératoire pourront continuer à pratiquer ces activités, sous certaines conditions. Ils devront avoir au moins un an d’ancienneté en équivalent temps plein au 30 juin 2019. Ils devront surtout s’inscrire à une épreuve de vérification des connaissances avant le 31 octobre prochain, et la valider. Une orientation vivement critiquée par le Syndicat national des infirmiers de bloc opératoire (SNIBO), qui dénonce un « mépris des instances », alors qu’il réclamait cinq ans d’expérience dans les blocs pour « préserver la spécificité et les compétences » de la profession.
Des mesures jugées insuffisantes
Le constat est sans appel. Les 70 millions d’euros débloqués par Agnès Buzyn n’auront pas permis d’apaiser les tensions. S’ils saluent le « geste », les syndicats hospitaliers jugent les premières mesures financières « insuffisantes », à commencer par le montant de la prime de risque, exigeant notamment une revalorisation salariale à hauteur de 300 euros pour palier des difficultés de recrutement. A plus large échelle, ils espèrent obtenir quatre milliards d’euros pour réformer durablement les hôpitaux et les EHPAD.
Entamé il y a trois mois, le mouvement de grève ne faiblit pas. La colère des soignants a même tendance à s’amplifier. Dans leur « quête », ils bénéficient d’un très large soutien populaire. Selon les résultats du baromètre « Carnet de santé », réalisé par Odoxa pour la Mutuelle nationale des hospitaliers, la quasi-totalité des Français (92 %) et des professionnels de santé (96 %) sont favorables à leur action. Un chiffre symbolique résume à lui seul la nature des enjeux. D’après la Drees, le nombre de passages aux urgences a doublé en vingt ans. Il atteignait 21,4 millions en 2016. Une situation d’autant plus préoccupante qu’elle s’est sans doute aggravée aux cours des trois dernières années.
(*) https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2019/6/28/SSAH1918360D/jo/texte
(**) https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000038704544&categorieLien=id