Malgré le reconfinement, la circulation du virus ne ralentit pas. Elle repart même à la hausse depuis plusieurs jours. Les spécialistes redoutent d’ores-et-déjà un relâchement pendant les fêtes de fin d’année, au point d’évoquer la perspective d’une troisième vague. Dans un contexte empreint d’incertitudes, un cadrage national nous paraît indispensable pour garantir la formation des futurs professionnels de santé.

Nous faudra-t-il solliciter à nouveau le ministère de la Santé pour obtenir gain de cause ? Très certainement. Qu’importe les difficultés à l’œuvre, l’esprit de solidarité ne faiblit pas, bien au contraire. Les étudiants et les équipes enseignantes s’interrogent néanmoins sur le sens de la continuité pédagogique dans des formations où la moitié du temps est consacrée à l’apprentissage.

Lors de la journée annuelle des adhérents, nous avons longuement débattu sur les problématiques auxquelles nous sommes quotidiennement confrontés. Elles sont conjoncturelles. Elles sont aussi structurelles. Nous avons constaté combien il nous était difficile de nous faire entendre de nos tutelles ou de nos partenaires, même avec des arguments de poids.

Encadrement, suivi médical et psychologique, précarité… Cette crise sanitaire exacerbe des préoccupations récurrentes qu’il conviendra de traiter rapidement. Le 10 décembre dernier, la mobilisation des étudiants en soins infirmiers était avant tout l’expression d’un ras-le-bol généralisé. Elle reflétait également une inquiétude légitime pour leur avenir que nous partageons avec eux.

Le comité de suivi du Ségur de la santé et les récentes déclarations de Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, laissent entrevoir des améliorations notables de la condition étudiante. Optimiste mais prudente, l’ANdEP suivra l’évolution de la situation avec la plus grande attention. La concrétisation de ces engagements est une priorité absolue.

Je vous souhaite à tous de très belles fêtes de fin d’année… revisitées ! Et un repos bien mérité !

La présidente de l’ANdEP dévoile le contenu des réflexions menées lors de la journée annuelle des adhérents, qui s’est tenue le 4 décembre dernier. Les impacts de la crise sanitaire sur les différentes formations paramédicales soulèvent de nombreuses interrogations. Ils tracent aussi de nouvelles perspectives. Constats et propositions.

 

Comment s’est déroulée la traditionnelle journée annuelle des adhérents de l’ANdEP ?

Initialement prévue au mois de mars, elle avait été repoussée en octobre, puis en décembre. Reconfinement oblige, elle s’est tenue à distance, en visio-conférence. La moitié des adhérents ont répondu présent. Une vraie performance dans le contexte actuel ! La journée s’est déroulée en deux temps. Le matin, il était question de nos relations avec les tutelles. L’après-midi était consacrée aux liens que nous entretenons avec les étudiants, les autres instituts de formation et les établissements de soins, qu’ils soient hospitaliers ou médico-sociaux.

Quels ont été les principaux impacts de la crise sanitaire sur les instituts de formation paramédicaux ?

Le positionnement des ARS soulève de nombreuses interrogations. La gestion de l’urgence sanitaire aura été très variable selon les territoires, mais aussi entre les deux vagues épidémiques. Une constante émerge toutefois : le manque de cohérence dans les décisions publiques. Certains de nos établissements ont été fermés, alors que le virus circulait faiblement… et vice-versa. Il manque une stratégie claire pour maintenir la continuité de la formation.

Que proposez-vous ?

Depuis le début de la crise, nos instituts de formation fonctionnent tant bien que mal, au gré des injonctions formulées par les ARS. Qu’importe l’apprentissage ou la qualification professionnelle, les chances doivent être les mêmes pour tous. Les besoins doivent être évalués plus rigoureusement pour réduire les pertes de chance. Les ARS doivent pleinement assumer leur rôle, y compris au sein de nos structures.

C’est-à-dire ?

Nombre d’ARS se sont désengagées de la présidence de certaines de nos instances. C’est vrai pour l’ICOGI*. C’est aussi vrai pour les conseils de discipline et les conseils techniques. Le phénomène ne date pas d’aujourd’hui. Il a même tendance à s’amplifier avec le temps. Il est devenu réellement problématique pendant la crise. Cette responsabilité génère une charge de travail importante et une pression accrue pour les directeurs d’institut. Les ARS doivent garder la place qui leur est conférée par les textes officiels. Elles doivent également nous aider à trouver des terrains de stage.

Vos liens tutélaires avec deux ministères distincts ont-ils été un frein dans la gestion de vos établissements ?

Nous avons inévitablement pâti de cette « double valence ». Nous étions souvent pris entre deux feux, sans trop savoir quelles directives appliquer. Le vade-mecum publié par le ministère de la Santé ne suffit pas. Les règles sont trop disparates d’une région à l’autre. Les inégalités croissantes en matière d’accès à la formation nécessitent un cadrage national. Une chose est sûre : la continuité pédagogique et les stages professionnels doivent être rapidement élevés au rang de priorité absolue. Il en va de l’intérêt de nos patients. Il en va de l’avenir de nos soignants. Il en va de l’attractivité de nos professions.

Pleinement mobilisés pendant la crise, les étudiants ont-ils été bien accueillis dans les établissements de soins ?

Nous n’avons pas constaté de difficultés particulières concernant les étudiants venus prêter main forte aux équipes de soins. En revanche, l’accueil en stage pose question. La problématique des équipements de protection individuelle reste entière. Le financement du matériel adéquat ne peut pas reposer sur les finances des étudiants ni celles de nos instituts. Une instruction a été publiée au mois d’août dernier, à propos des tenues. Il appartient aux établissements de soins de leur fournir, ce qui est parfois difficile pour des raisons purement logistiques. L’expérience prouve que le message n’est pas passé partout. Il nous faut néanmoins faire preuve de diplomatie. C’est un sujet délicat qui pourrait nous coûter des places de stage, dont nous avons cruellement besoin.

Un besoin renforcé par la hausse programmée des quotas de formation prévue dans le Ségur de la santé…

Effectivement. Pour mener à bien cette réforme, nous aurons besoin de moyens supplémentaires, à commencer par des stages qualifiants en nombre suffisant, sans lesquels il nous sera impossible de former de nouveaux professionnels. Aucune réglementation ne contraint actuellement un établissement de soins à accueillir un stagiaire. Il faudra probablement réfléchir à des dispositifs plus incitatifs. Il faudra également reconnaître et valoriser le tutorat, avec la création d’un statut spécifique. Certains ajustements seront par ailleurs indispensables dans la formation des cadres de santé, à commencer par le renforcement du volet pédagogique.

Dans vos instituts, comment les équipes de formation se sont-elles adaptées à la crise sanitaire ?

Face à des orientations contradictoires et confusantes, elles ont su faire preuve d’une réactivité exceptionnelle et d’une capacité d’adaptation remarquable. Je pense aux directeurs d’institut et aux équipes pédagogiques, mais aussi aux personnels administratifs que l’on a trop souvent tendance à oublier, quand il s’agit d’évoquer le bon fonctionnement de nos structures. Malgré les nombreuses difficultés rencontrées depuis un an, le bilan est très satisfaisant. Nous avons globalement su maintenir la continuité de l’enseignement. Nous avons également pu diplômer nos étudiants.

Quid de l’enseignement à distance ?

A l’heure du premier confinement, nous avons dû totalement repenser nos stratégies d’apprentissage. Pour la plupart, il nous a fallu maîtriser des outils technologiques peu familiers, ne serait-ce que pour proposer un suivi adapté et personnalisé à nos étudiants, en formation initiale ou en stage. Nos équipes pédagogiques ont relevé le défi avec sérieux et application, y compris dans l’accompagnement de la détresse psychologique. Durant l’été, nous avons tiré tous les enseignements de cette nouvelle pratique. Cette réflexion de fond devra se prolonger au-delà de la crise.

Quelles sont les voies de progrès envisagées ?

Le numérique doit définitivement trouver sa place dans l’enseignement, en tant que levier stratégique de la formation. Nous ne sommes pas encore rompus à ce type d’exercice. Nous devrons approfondir nos méthodes et restructurer notre ingénierie. Nous aurons également besoin d’outils et de référentiels fiables. Nous devrons par ailleurs réfléchir au management à distance. De toute évidence, le secteur de la formation n’échappera pas à l’essor programmé du télétravail. Nous ne négligerons pas pour autant le facteur humain. Nous l’avons tous constaté : le partage et l’échange perdent en intensité dans le monde virtuel.

Propos recueillis par Hugues Rieu

(*) Instance compétente pour les orientations générales de l’institut – ICOGI.

Le gouvernement a dévoilé les grands axes de sa stratégie vaccinale, avec trois objectifs en ligne de mire : faire baisser la mortalité et les formes graves de la Covid-19 ; protéger les soignants et le système de santé ; garantir la sécurité des vaccins et de la vaccination.

Conformément au calendrier arrêté début décembre, la campagne nationale se déroulera en trois temps. Elle débutera le 4 janvier dans les établissements de soins médico-sociaux, en tête desquels figurent les EHPAD. Tous les résidents et tous les personnels susceptibles de développer une forme grave de la maladie seront ciblés, soit un peu plus d’un million de personnes.

Fin février, elle s’élargira progressivement aux sujets âgés à risque et aux professionnels de santé, en fonction de la disponibilité des vaccins. Par ordre de priorité, les plus de 75 ans, les plus de 65 ans et les plus de 50 ans seront les premiers servis.

Au printemps prochain, toutes les autres tranches de la population seront éligibles. Ici encore, la priorité sera donnée aux 50-64 ans, aux professionnels issus de secteurs essentiels et aux personnes vulnérables et précaires.

Totalement gratuite, la vaccination ne sera pas obligatoire pour autant. A noter : le seul vaccin accessible durant la première phase sera celui de Pfizer et BioNTech. Un produit qui vient tout juste d’être déconseillé par les autorités sanitaires britanniques à « tout individu ayant un historique de réaction allergique importante à des vaccins, des médicaments ou de la nourriture ». Quelques jours après le lancement de la campagne de vaccination au Royaume-Uni, deux incidents de ce type avaient déjà été signalés.

Les nouvelles élections aux URPS se dérouleront du 31 mars au 7 avril 2021. Outre les médecins, les pharmaciens et les chirurgiens-dentistes, trois professions paramédicales sont directement concernées : les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes.

Au-delà des défis territoriaux, la représentativité de chaque syndicat à l’échelon national est en jeu. Une condition sine qua non pour s’asseoir à la table conventionnelle et négocier les futures évolutions de la profession avec les pouvoirs publics. En marge de l’officialisation du calendrier électoral*, un décret publié début décembre assouplit les conditions d’organisation du scrutin**. Opposés à cette réforme, le CNPS et la FFPS déplorent notamment un doublement des frais liés au vote électronique : « Les électeurs devront payer plus pour avoir moins ! Ils ne pourront plus recevoir les programmes, ni la composition des listes en compétition. Ils devront se débrouiller pour télécharger ces informations sur la plateforme dédiée. » Les deux intersyndicales dénoncent « une gabegie inutile et coûteuse » dans le contexte économico-sanitaire actuel.

Selon le ministère, le montant prélevé sur les cotisations payées par les professionnels de santé pour assurer le fonctionnement des URPS se chiffre à cinq euros par électeur. Plus ou moins importante selon les professions et leur taille, cette « amputation des ressources » est jugé inéquitable, en particulier pour les plus petites structures.

(*) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042580453
(**) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000042589326/2020-11-30/

Une nouvelle fois mobilisés, les étudiants en soins infirmiers bénéficieront d’une prime exceptionnelle, variable selon leur niveau d’étude.

Fixé sur la base d’une durée de stage de 35 heures par semaine, le montant de cette indemnité hebdomadaire atteindra 98,50 euros en deuxième année et 86,50 euros en troisième année. Elle perdurera tout au long de l’état d’urgence sanitaire. Financée sur les crédits de l’assurance maladie, elle doit être versée par l’ARS dont relève l’établissement avant la fin de l’année… ou un mois après la fin du stage, au plus tard.

Le coût total de cette opération est estimé à vingt millions d’euros par le ministère de la Santé et des Solidarités. Au-delà de cette seule mesure, leurs indemnités de stage* seront prochainement revalorisées à hauteur de 20 %. Prévue par le Ségur de la santé, cette disposition entrera en vigueur le 1er janvier prochain. Elle s’appliquera à tous les apprentis infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, manipulateurs en électroradiologie médicale et ergothérapeutes.

(*) Hors primes exceptionnelles, les indemnités de stage des étudiants en soins infirmiers sont actuellement plafonnées à 40 euros par semaine en deuxième année. Elles atteignent 50 euros en troisième année.

A l’initiative de l’ARS Hauts-de-France, une trentaine d’équipes de professionnels de santé libéraux intervient actuellement auprès des malades et des cas contacts. Intérêt des mesures de prévention, organisation du logement, gestion du stress et des risques psychologiques, adaptation des consignes d’isolement face à une situation particulière, impact du virus sur les activités habituelles…

Tous les volontaires ont suivi une formation spécifique. Une fois alertée, l’équipe mobile intervient dans un délai de vingt-quatre heures, y compris au domicile des patients. Elle est chargée d’identifier les besoins et les attentes du requérant. Le cas échéant, elle peut également faire le lien avec les cellules territoriales d’appui à l’isolement de la préfecture, notamment pour le portage de repas ou l’approvisionnement en produits de première nécessité.

Depuis mi-octobre, 200 personnes ont déjà bénéficié de cet accompagnement. Face à la hausse de la demande, 50 nouvelles équipes seront prochainement déployées dans toute la région. Conçu par l’URPS Médecins Libéraux, le service est financé par l’ARS. Les professions paramédicales sont pleinement impliquées dans ce dispositif.

Selon Olivier Véran, la troisième vague épidémique pourrait être celle de la santé mentale. Pour mieux mesurer l’ampleur du phénomène, France Assos Santé vient de lancer une étude sur les conséquences psychiques de la crise et ses répercussions sur le suivi des pathologies chroniques*.

Cette organisation inter-associative sollicite 10 000 volontaires pour répondre – une fois par mois – à un questionnaire en ligne autour de trois sujets clés : l’anxiété, la prise en charge et la vie courante. Cette initiative doit notamment permettre d’éclairer les décideurs sur les impacts psychologiques à long terme de la pandémie dans la société française. Un bilan détaillé sera effectué à l’issue de l’enquête… en mai 2022. Des résultats préliminaires seront toutefois présentés un an avant l’échéance.

Les premiers enseignements de la phase pilote, menée auprès de 2 000 participants pendant le premier confinement, laissent craindre le pire. A la suite d’un rendez-vous médical déprogrammé, 78,9 % des répondants ont ressenti une forme d’anxiété ; 68 % ont constaté une prise en charge dégradée. Des chiffres significatifs qui méritent encore confirmation. « Il s’agit d’une tendance et non d’une preuve robuste, en raison de la faiblesse du nombre de réponses colligées », nuance France Assos Santé.

(*) Voir : https://www.vivre-covid19.fr/

L’expérience du printemps dernier doit avoir valeur d’exemple. Dans un communiqué commun*, les Ordres de santé lancent un appel à la mobilisation pour garantir la continuité des soins pendant le nouveau confinement.

Selon eux, la sensibilisation de la population sera un paramètre essentiel pour réduire au maximum les retards de diagnostic et les ruptures de prise en charge. Ils invitent d’ailleurs tous les patients à poursuivre leurs consultations, y compris en ville. Les différentes instances professionnelles sont catégoriques : le suivi des pathologies et des traitements ne doit être interrompu sous aucun prétexte, ne serait-ce que pour prévenir des complications évitables. « Il en va de la santé de chacun, à laquelle nous ne saurions renoncer, même dans cette période particulière », écrivent-elles. Elles précisent également que les examens et les soins médicaux font partie des motifs de sorties autorisées, non sans souligner qu’il existe aujourd’hui des solutions dématérialisées sûres et efficaces, comme la téléconsultation ou le télésoin.
Une nouvelle fois mis à contribution, les étudiants de la filière sanitaire répondront présents**.

Redoutant déjà les impacts potentiels de cette remobilisation sur leur formation et leur état de santé, ils réclament cependant des garanties aux pouvoirs publics. D’après le Centre national d’appui, plus de la moitié des apprentis sollicités présentaient « un score significatif » sur l’échelle de détresse psychologique, à l’issue de la première vague. Outre la préoccupation liée à la validation de leur diplôme, la fatigue majeure générée par l’intégration d’un service en tension, l’insuffisance des moyens de protection ou encore la peur de prodiguer de mauvais soins aux patients par manque de formation et d’encadrement, le dérèglement de leur apprentissage et leur mobilisation massive a exacerbé leurs craintes de devenir de moins bons praticiens.

(*) Ce communiqué a été co-signé par les présidents des Ordres des médecins, des sages-femmes, des infirmiers, des chirurgiens-dentistes, des masseurs-kinésithérapeutes, des pédicures-podologues et des pharmaciens. Lire ce communiqué
(**) Ce communiqué a été co-signé par l’ANEMF, l’ANEPF, l’ANESF, la FNEK, la FNESI, la FNSIP-BM, l’ISNAR-IMG, l’ISNI, l’UNECD et la FAGE. Lire ce communiqué

Recrudescence des cas oblige, le reconfinement doit permettre de limiter les effets dévastateurs d’une seconde vague épidémique que les spécialistes annoncent plus virulente que la première. Si la recherche vaccinale progresse, les perspectives sanitaires et économiques restent plus que jamais incertaines. Explications.

Un mois ferme, au mieux. Le retour en force du virus a fait rougir tous les indicateurs de gravité, au point de se solder par un reconfinement généralisé qui a débuté le 30 octobre dernier. Impuissant et fataliste, Emmanuel Macron ne pouvait que constater les dégâts. « Les mesures prises ne suffisent plus. Si nous ne donnons pas aujourd’hui un coup de frein brutal aux contaminations, nos hôpitaux seront très vite saturés. Quoi que nous fassions, près de 9 000 patients seront en réanimation à la mi-novembre. Nos capacités maximales seront alors quasiment atteintes. Faute de personnels qualifiés, nous pourrons difficilement aller au-delà. » Refusant la perspective sordide de « trier les malades », il a également exclu la piste de l’immunité collective : « Si on le laissait circuler librement, le virus pourrait causer 400 000 morts de plus en quelques mois seulement. Jamais la France n’adoptera cette stratégie ! »
Cette fois, le confinement sera moins strict. Plus souple et probablement moins long, sera-t-il aussi efficace ? Le président de la République a été catégorique : « L’économie ne doit ni s’arrêter ni s’effondrer. ». Les écoles resteront ouvertes, les activités essentielles seront maintenues, les structures d’hébergement pour personnes âgées pourront être visitées. Des protocoles sanitaires adaptés ont été déployés.

Les premiers impacts…

Dix jours plus tard, les premiers impacts sont déjà perceptibles. Ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran évoquait « un ralentissement dans la progression de l’épidémie », se gardant toutefois de tirer des conclusions hâtives. Ce « frémissement » mérite confirmation. Les conséquences économiques sont nettement plus évidentes. Selon la Banque de France, le produit intérieur brut devrait être amputé de douze points en novembre. A titre de comparaison, il avait chuté de 31 % au mois d’avril. Moins importante, la baisse n’est pas anodine pour autant. Selon Olivier Dussopt, ministre des Comptes publics, un mois de confinement coûterait entre 50 et 75 milliards d’euros à l’économie française.
Les nouvelles ne sont guère meilleures sur le plan budgétaire. Une fois encore, le déficit prévisionnel de la Sécurité sociale a été revu à la hausse. Il devrait finalement atteindre 49 milliards d’euros en fin d’année. La perte des recettes attendues au dernier trimestre et les surcoûts sanitaires liés à la flambée épidémique représentent une dépense supplémentaire non négligeable, estimée à 2,4 milliards. A eux seuls, les tests de dépistage font gonfler la facture de 400 millions d’euros. Une somme qui couvrira l’augmentation naturelle des besoins en novembre et en décembre.
Une nouvelle stratégie de déconfinement ?
Si la date officielle n’a pas encore été dévoilée, le gouvernement prépare déjà le déconfinement. Mise entre parenthèses, la stratégie « tester, alerter, protéger » reprendra ses droits, à quelques évolutions près. La généralisation des tests antigéniques devra notamment permettre de désengorger les laboratoires de biologie médicale, dont la fréquentation habituelle a pratiquement quadruplé ces dernières semaines. L’intervention des médecins, des pharmaciens et des infirmiers devrait également contribuer à freiner la circulation du virus, en améliorant sa détection précoce. La rapidité des résultats et l’élargissement des sites de prélèvement ne fera pas tout. Ruptures d’approvisionnement potentielles, pénuries latentes sur certains équipements de protection indispensables, cible populationnelle restreinte, sensibilité perfectible, mobilisation professionnelle insuffisante : les zones de fragilité sont clairement identifiées. Autre évidence, il n’y aura pas de dépistage efficace sans un traçage minutieux des cas contacts. L’exécutif compte particulièrement sur la diffusion massive et l’utilisation effective de l’application TousAntiCovid, une version améliorée de StopCovid. Signal encourageant : elle a été téléchargée plus de sept millions de fois en une semaine, contre un peu moins de trois millions de téléchargements en l’espace de cinq mois.
Seul rempart durable contre le nouveau coronavirus, l’arrivée d’un vaccin fiable se fait toujours attendre. Une dizaine de candidats sont actuellement en phase III. L’un d’entre eux pourrait être le bon*, mais la partie est loin d’être gagnée. Le chemin de la guérison sera encore long. Toujours aussi incertain, le « monde d’après » n’est pas pour demain.

(*) Selon les premières données préliminaires communiquées par Pfizer et BioNTech, leur candidat-vaccin présente un niveau d’efficacité très élevé contre le risque d’infection au nouveau coronavirus, estimé à 90 %. Si ces résultats se confirment, une demande d’enregistrement pourrait être déposée d’ici à la fin du mois auprès de la FDA