Le dépistage individuel ne sera plus l’apanage exclusif des biologistes. Aux côtés des médecins et des pharmaciens, les infirmiers sont désormais autorisés à pratiquer des tests antigéniques par voie nasopharyngée pour faciliter la détection précoce du SARS-CoV-2.

Ils devront prioritairement cibler les patients symptomatiques depuis moins de quatre jours, à l’exclusion des plus de soixante-cinq ans et des personnes susceptibles de développer une forme grave de la maladie. Autre contrainte imposée, les sujets éligibles devront être dans l’incapacité d’obtenir un résultat en moins de quarante-huit heures via un test RT-PCR. Non prioritaires, les asymptomatiques pourront néanmoins en bénéficier, à l’exception des cas contacts et des ressortissants d’un cluster identifié. A noter : les tests antigéniques sont intégralement remboursés par la Sécurité sociale*. Aucune ordonnance ne sera nécessaire.

Cet élargissement du nombre de préleveurs répond à deux objectifs précis : limiter la propagation du virus et désengorger les laboratoires de biologie médicale, à l’aide d’un diagnostic rapide pouvant être obtenu en moins de trente minutes. Dans le cadre de cette nouvelle mission de santé publique, les infirmiers profiteront d’une rétribution spécifique. Trois niveaux de rémunération sont prévus dans les textes : 19,21 euros (si l’examen est réalisé dans le cadre d’un dépistage collectif) ; 27,39 euros (si l’examen est réalisé sur le lieu d’exercice) ; 29,92 euros (si l’examen est réalisé au domicile du patient).

Les volontaires seront également tenus de remonter les données recueillies en temps réel auprès de l’assurance maladie par le biais d’une plate-forme numérique sécurisée, à savoir le SI-DEP, auquel ils auront prochainement accès. En attendant, ils procèdent par téléphone ou par messagerie sécurisée, uniquement pour les cas positifs. A l’instar des masques de protection, les tests antigéniques sont distribués gratuitement par les pharmaciens sur présentation d’un justificatif professionnel.

(*) La liste des tests antigéniques autorisés est régulièrement mise à jour sur le site du ministère de la Santé : https://covid-19.sante.gouv.fr/tests

La grève du 15 octobre a visiblement poussé le gouvernement à accélérer les démarches. La recrudescence du virus aussi. Actée mi-juillet dans le cadre du Ségur de la santé, la revalorisation des métiers non-médicaux du secteur public interviendra plus vite que prévu.

La seconde tranche de l’augmentation accordée aux personnels des établissements hospitaliers et médico-sociaux sera finalement versée le 1er décembre, et non pas en mars 2021 comme le prévoyait le calendrier initial. Près de deux millions de salariés obtiendront donc une revalorisation mensuelle de 183 euros nets avant la fin de l’année*.

Les 100 000 praticiens hospitaliers ou hospitalo-universitaires éligibles bénéficieront du même traitement de faveur. Ils percevront également l’intégralité de l’indemnité d’engagement de service public exclusif le 1er décembre, soit 1 010 euros bruts par mois**. « L’anticipation de ces revalorisations correspond à un engagement sans précédent du gouvernement. A l’heure où nos professionnels font face à une seconde vague épidémique, nous n’aurons pas la main qui tremble pour leur accorder la reconnaissance que nous leur devons », soulignait Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, à l’heure d’officialiser la nouvelle.

(*) Les salaires des personnels non-médicaux des établissements de santé et médico-sociaux publics avaient été revalorisés à hauteur de 90 euros nets par mois en septembre dernier.
(**) Les salaires des médecins ayant fait le choix exclusif du service public hospitalier avaient été augmentés de 207 euros bruts par mois en septembre dernier. Pour rappel, cette indemnité était plafonnée à 493 euros avant les accords du Ségur.

Pour pallier le manque de personnel dans le secteur du grand âge, le gouvernement exhorte les préfets à mener « une campagne de recrutement d’urgence » dans les départements et les régions, en lien avec les ARS.

Ils ont été récemment missionnés pour réunir tous les acteurs de l’emploi dans les territoires, et appuyer les initiatives locales pour renforcer les moyens humains dans les établissements déficitaires. Face à l’urgence, il leur a été demandé de rendre compte de leurs actions avant la mi-novembre. Impulsée par la ministre déléguée chargée de l’autonomie, cette initiative devra permettre d’identifier des solutions concrètes pour répondre à la hausse des besoins, exacerbés en temps de crise sanitaire. Un accent particulier devra être mis sur certains métiers en tension, comme les aides-soignants, les accompagnants éducatifs et sociaux, les auxiliaires de vie et les aides à la personne. Selon Brigitte Bourguignon, l’enjeu consiste notamment à sécuriser l’organisation des visites en Ehpad, maintenues malgré le reconfinement.
A plus large échelle, la formation sera l’un des principaux vecteurs de la transformation attendue. Pour lever les difficultés observées, Pôle Emploi porte actuellement un projet expérimental en Occitanie, avec le concours du SYNERPA, de la Croix Rouge et du GRETA.

Lancée il y a un an, une formation d’accompagnant en gérontologie de niveau V a été dispensée dans quatre villes de la région. Pas moins de 66 personnes ont déjà été formées, dont 47 demandeurs d’emploi. Trois mois après l’obtention du titre, 85 % d’entre eux ont retrouvé du travail. 22 stagiaires ont même décroché un CDI. Forte de son succès, l’opération a été reconduite cette année sur un panel élargi.

Fatigués, malmenés, surchargés et désabusés, les infirmiers présentent tous les symptômes du burn out. Telles sont tout du moins les principales conclusions de la concertation en ligne, lancée début octobre par l’ONI*.

La profession se disait alors au bord de la rupture, avant même l’arrivée de la seconde vague épidémique. En ville comme à l’hôpital, la dégradation des conditions de travail cristallise les frustrations. Près des deux tiers des répondants se déclarent en état d’épuisement professionnel (57 %). Un chiffre d’autant plus inquiétant qu’il a pratiquement doublé depuis le début de la crise**. Accentué par la douloureuse expérience du nouveau coronavirus, ce mal-être grandissant pourrait avoir des conséquences dramatiques à moyen terme. Nombre d’infirmiers expriment clairement l’envie de changer de métier (37 %). Plus préoccupant encore, ils ne sont pas sûrs d’exercer cette fonction dans cinq ans (43 %).
Dans ce contexte délétère, l’instance ordinale réclame des mesures urgentes pour améliorer leur quotidien, mais aussi pour restaurer l’attractivité d’une profession dégradée. « La revalorisation des conditions financières et l’évolution des carrières seront deux leviers critiques pour pérenniser l’engagement des professionnels et en attirer de nouveaux », souligne Patrick Chamboredon, son président.

Le constat est implacable : 34 000 postes sont aujourd’hui vacants, alors qu’il faudrait en créer davantage pour garantir le bon fonctionnement du système de santé.

(*) Selon l’ONI, 59 368 infirmiers ont répondu à cette concertation en ligne, menée entre le 2 et le 7 octobre derniers.
(**) Il y a neuf mois, 33 % des infirmiers faisaient déjà part de leur mal-être, dans le cadre d’une précédente consultation réalisée par l’ONI.

Cette fois, nous y sommes. La seconde vague épidémique est là.

Depuis plusieurs jours, nos instituts de formation fonctionnent tant bien que mal, au gré des injonctions formulées par les ARS. Imprévisible, la situation pourrait devenir encore plus inconfortable dans un avenir proche. Qu’importe l’apprentissage ou la qualification professionnelle, les chances doivent être les mêmes pour tous. Les besoins doivent aussi être plus rigoureusement évalués pour réduire les pertes de chance.

Notre participation à l’urgence sanitaire tombe sous le sens. Personne ne le conteste. Celle des étudiants aussi, mais pas à n’importe quel prix. Leur formation ne peut pas être négligée. Leur santé physique et mentale non plus. Trop souvent considérés comme une variable d’ajustement humaine, ils n’ont pas à payer le manque de ressources disponibles dans les structures déficitaires… Un mal profond et durable qui ne relève pas uniquement de la Covid-19.

Le vade-mecum publié par le ministère de la Santé ne suffit pas. Les règles sont aujourd’hui trop disparates d’une région à l’autre. Les inégalités croissantes en matière d’accès à la formation nécessitent un cadrage national. La continuité pédagogique et les stages d’apprentissage doivent être rapidement élevés au rang de priorité absolue. Il en va de l’intérêt de nos patients. Il en va de la crédibilité de notre système de santé. Il en va de l’avenir de nos soignants. Il en va de l’attractivité de nos professions.

Le PLFSS 2021 traduit l’effort de l’exécutif en faveur du secteur de la santé… au prix d’un creusement abyssal et durable des comptes sociaux. L’an prochain, les dépenses de la branche maladie progresseront a minima de 3,5 %, à 224,6 milliards d’euros. Retour sur les grandes lignes du projet de loi qui sera prochainement débattu au Parlement.

Particulièrement attendu, le PLFSS 2021 a été officiellement présenté le 29 septembre dernier. Caractérisé par un dérapage sans précédent des dépenses de santé et des investissements records, le texte a une portée historique. Le discours officiel résume les enjeux en présence : « C’est un budget marqué par la crise sanitaire, mais c’est aussi un budget de transformation pour le système de santé, résolument tourné vers l’avenir ! » Ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran n’exclut pas pour autant la perspective d’un retour à équilibre des comptes sociaux, refusant catégoriquement de faire porter le chapeau aux générations futures. « Nous devrons imaginer de nouvelles règles, de nouveaux financements et de nouveaux modes de régulation. » Quoi qu’il en soit, la dette devrait néanmoins se stabiliser de façon chronique pendant plusieurs années encore, aux alentours de 20 milliards d’euros. Avalisé par le Parlement, le transfert progressif d’un passif de 136 milliards à la CADES*, dont la durée de vie sera mécaniquement prolongée jusqu’en 2033, n’y changera rien.

Un déficit abyssal

La situation est critique. En fin d’année, le déficit de la Sécurité sociale devrait s’établir à 44,4 milliards d’euros, bien loin des 5,4 milliards initialement budgétés. Cette brutale dégradation est due pour les deux-tiers à la chute des recettes, estimée à près de 27 milliards d’euros. Masques, matériels de protection, molécules utilisées en réanimation, respirateurs, tests RT-PCR, recrutements, arrêts maladie, primes… La crise sanitaire a également fait son office, avec un coût global chiffré à 15 milliards d’euros. Un surplus toutefois compensé par les économies liées à la baisse de la consommation de soins pendant le confinement (4 Mds€), sans oublier la première partie** de la taxe exceptionnelle sur le chiffre d’affaires des mutuelles et des complémentaires santé (1 Md€). Consolidé à dix milliards, cet « effet Covid » s’est notamment soldé par une réévaluation significative de l’Ondam 2020, dont le niveau a été relevé à 7,6 %. En temps normal, il aurait été plafonné à… 2,45 %.
Tant bien que mal, l’exécutif tente de maîtriser les dégâts. A la faveur d’un plan d’économies de 4 milliards d’euros, le « trou de la Sécu » devrait être réduit à 27,1 milliards en 2021. Les produits de santé représenteront près du tiers des coupes effectuées, soit 1,7 milliard. Elles reposeront essentiellement sur des baisses de prix imputées aux médicaments (620 M€) et aux dispositifs médicaux (150 M€). Le potentiel des génériques et des biosimilaires sera également mis à contribution (110 M€).

Un taux d’évolution inédit

Malgré cette rigueur budgétaire apparente, l’Ondam progressera l’an prochain de 3,5 %. Il pourrait même être sensiblement revu à la hausse, si le gouvernement venait à utiliser les crédits provisionnés pour financer l’achat de tests, de masques et de vaccins, mais aussi certaines missions exercées par Santé publique France (4,3 Mds€). Le cas échéant, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie atteindrait alors 6 %. Comme le souligne Olivier Véran, il s’agit d’un « taux d’évolution inédit depuis plus d’une décennie », qui permettra notamment de concrétiser une partie des revalorisations accordées dans le cadre du Ségur de la santé aux praticiens hospitaliers, aux internes et aux paramédicaux exerçant dans les établissements de soins et les EHPAD (5,8 Mds€). Egalement actée en juillet dernier, la reprise du tiers de la dette hospitalière (13 Mds€) sera finalement étalée sur quinze ans, soit jusqu’en 2034. Les premiers versements interviendront cependant l’an prochain.
Autres mesures structurelles de ce texte qui présente tous les attributs d’une loi de santé : le prolongement pour deux ans du remboursement intégral des téléconsultations, la création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale pour la dépendance, l’expérimentation d’un paiement forfaitaire pour les activités de médecine à l’hôpital, la révision et la simplification des dispositifs d’accès aux médicaments innovants ou encore l’allongement de la durée du congé paternité. A noter : le calendrier de la réforme du 100 % Santé n’a pas été modifié.

 

(*) Caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES.

(*) Une contribution supplémentaire de 500 millions d’euros est également prévue au titre de l’exercice 2021. Elle dépendra néanmoins du montant des économies effectivement réalisées par les organismes complémentaires.

(***) La « branche dépendance » sera gérée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Elle bénéficiera d’un financement propre. 28 milliards d’euros de contribution sociale généralisée lui seront affectés dès 2021.

Libéraux et salariés, même combat. Les Etats Généraux Infirmiers se sont tenus le 1er octobre dernier, à Paris.

Globalement déçues par les conclusions du Ségur de la santé, les trente-quatre organisations professionnelles réunies pour l’occasion ont formulé vingt-cinq propositions concrètes, que ses auteurs aimeraient voir intégrées au PLFSS 2021.  Parmi les plus emblématiques d’entre elles, citons la modification du statut de l’infirmier diplômé d’Etat dans le Code de la santé publique (l’infirmier doit être catégorisé comme un professionnel de santé et non plus comme un auxiliaire médical, ndlr), l’élargissement du droit de prescription (antalgiques mineurs en vente libre, matériel nécessaire à l’autonomie…), la création de nouvelles consultations (premier recours, évaluation et coordination du parcours de santé, prévention et éducation à la santé…), la mise en place de nouvelles pratiques avancées, la détermination d’un ratio de patients par infirmier pour chaque service dans les établissements de santé publics et privés, la généralisation du télé-soin ou de la téléconsultation et la revalorisation significative des conditions tarifaires actuelles.

La formation occupe naturellement une place centrale dans ce projet. La réingénierie des cursus, le développement de la recherche en science infirmière et la valorisation de la maîtrise de stage ont notamment été élevés au rang de priorité. Il appartient désormais aux parties prenantes de convaincre les députés et les sénateurs pour traduire ces propositions dans la loi. A l’orée du débat parlementaire, ils avaient d’ailleurs prévu de se rendre dans leurs circonscriptions pour les inciter à déposer les amendements nécessaires. Précision de circonstance, ces évolutions concernent tout ou partie de la profession, selon les statuts et les compétences.

 

Masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, ergothérapeute, orthoptiste… Ces quatre métiers du secteur de la rééducation ont connu un fort engouement au cours des vingt dernières années, avec une hausse globale des effectifs de 78 %*.

Selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, cet accroissement est lié à l’allongement des carrières, mais il est surtout dû à une augmentation régulière des diplômés, dont le nombre a progressé de 75 % depuis le milieu des années 2000. Contre-intuitivement, cette opulence n’est visiblement pas incompatible avec une insertion très rapide sur le marché du travail. « 93 % des étudiants diplômés il y a sept ans ont trouvé leur premier emploi en moins de trois mois », souligne la Drees. Autre enseignement majeur de ce panorama** : la part des demandeurs d’emploi au sein des professions concernées demeure très faible, malgré la forte recrudescence des professionnels en activité. Elle est estimée à… 2,1 %.

(*) Selon la Drees, 121 000 professionnels de la rééducation de niveau bac+3 étaient en exercice l’an dernier, soit 89 000 masseurs-kinésithérapeutes, 14 000 pédicures-podologues, 13 000 ergothérapeutes et 5 000 orthoptistes. A titre de comparaison, ils étaient 68 000 en 2000.

(**) Voir : https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er1159.pdf

Depuis le mois de septembre, l’ARS de Bretagne propose une aide financière à l’installation aux infirmiers de pratique avancée libéraux.

Plusieurs conditions suspensives ont toutefois été posées pour prétendre à ce « bonus » de 13 500 euros*. Les nouveaux arrivants devront s’adonner à un exercice coordonné au sein d’une structure de référence**, impérativement implantée dans des territoires classés en zone d’intervention prioritaire ou en zone d’action complémentaire. Ils devront également s’engager à maintenir leur activité pendant au moins cinq ans, à hauteur de trois jours par semaine, avec un seuil minimum de 50 patients la première année (ce seuil sera ensuite porté à 150 patients, ndlr). Pour mesurer les premiers effets de ce dispositif expérimental, une évaluation complète sera réalisée dès l’an prochain. A noter : cette initiative s’inscrit dans un cadre incitatif plus large intégrant la formation des IPA libéraux, que l’ARS finance déjà depuis deux ans, à hauteur de 21 200 euros par an. Par le biais des universités de médecine de Rennes et de Brest, 85 infirmiers ont pu profiter de cette indemnisation, notamment conditionnée à l’engagement de s’installer dans la région pour une durée minimale de deux ans.

(*) Financée par le fonds d’intervention régional, cette aide financière à l’installation est cumulable avec celle de l’assurance maladie (27 000 €), mais aussi avec le forfait annuel de coordination pour un exercice en zone médicale sous-dense (1 120 €). Au total, un IPA en pratique exclusive qui répond à tous ces critères pourra bénéficier d’une enveloppe de 41 620 euros.

(**) Une maison ou un pôle de santé pluridisciplinaire, une communauté professionnelle territoriale de santé, un établissement sanitaire ou un établissement médico-social.