Régulation financière et réglementaire, admission des étudiants, harmonisation des droits, transversalité des enseignements, reconnaissance des travaux de recherche : la quête de l’intégration universitaire se poursuit inexorablement pour les formations paramédicales, avec quelques avancées notables à la clef.

Antoine Tesniere

Antoine Tesniere

Le constat est largement partagé. Les professions paramédicales sont au cœur de la réforme du système de santé, à bien des égards. « Le défi de la transformation, c’est aussi le défi de la formation, rappelle Florence Girard, présidente de l’ANdEP*. Il faut impérativement faciliter les passerelles entre les instituts, les écoles et les universités pour former et fidéliser les futurs professionnels, en favorisant les cursus et les enseignements communs. » Pour y parvenir, le processus d’universitarisation devra être mené à son terme. « Le changement sera long et complexe. Il est encore trop tôt pour dresser un bilan définitif, notamment en ce qui concerne la qualité de l’encadrement et de l’accompagnement pédagogique au sein des universités, mais les choses avancent dans la bonne direction », constate Antoine Tesniere, conseiller santé à la DGESIP*.
Qui dit universitarisation dit également intégration universitaire. Une étape significative vient d’ailleurs d’être franchie. Publié le 30 octobre dernier, un décret autorise désormais la création d’une section de qualification en sciences infirmières, au sein du Conseil national des universités. Une évolution qui touche par ailleurs la maïeutique et les sciences de la rééducation et de la réadaptation. En conséquence, les universités pourront bientôt recruter des enseignants-chercheurs pour consolider l’ancrage universitaire des formations en santé, avec le concours des instituts et des écoles. D’après les experts, la mesure est technique, mais sa portée symbolique et pratique est considérable.

Des avancées concrètes

Pour l’heure, la procédure suit son cours. « Les trois sections de qualification seront prochainement constituées. Il appartiendra ensuite aux universités de créer les postes, en lien étroit avec leurs partenaires et en composant avec les équipes enseignantes existantes », indique Stéphane Le Bouler, responsable de la mission interministérielle consacrée à l’universitarisation des professions paramédicales et maïeutiques, lancée par Agnès Buzyn et Frédérique Vidal en septembre 2017.
Certaines initiatives « préfiguratrices » démontrent le potentiel de cette orientation stratégique, mais aussi ses limites. Depuis quelques années, l’université de Créteil promeut une politique d’intégration (réussie) des professions paramédicales dans l’enseignement et la recherche. « C’est une réelle valeur ajoutée pour notre établissement et nos équipes scientifiques », estime le Pr Florence Canoui-Poitrine, PU-PH de santé publique, désignée par le Doyen de l’UPEC*** pour participer aux journées de l’ANdEP.

Les profils idoines sont néanmoins ciblés. « La faculté d’adaptation est primordiale pour s’intégrer dans une dynamique collective et collaborative. La valence clinique n’est pas forcément compatible avec la recherche, faute de temps à y consacrer. Ce n’est pas une difficulté propre aux professions paramédicales. Nous avons également constaté ce phénomène avec des médecins », détaille-t-elle. Une chose est sûre, les réformes et les incitations actuelles vont « élargir le champ des possibles » et permettre de « développer plus de projets », en particulier avec des infirmiers.

Des chantiers multiples

Autre chantier décisif, la transversalité des formations pourrait prendre une tournure plus concrète dans les mois à venir. Les expérimentations prévues par la loi Buzyn contribueront notamment à améliorer l’accès à la formation à et par la recherche, mais aussi à renforcer les mutualisations entre les universités et leurs « partenaires ». Selon Stéphane Le Bouler, une quinzaine de projets sont à l’étude dans le champ de la rééducation et de la réadaptation. Une vingtaine d’universités seraient également intéressées pour monter des expérimentations dans les soins infirmiers. « Cette démarche expérimentale doit permettre d’apporter les outils et l’assouplissement réglementaire nécessaires pour faciliter la construction de parcours inter-filières », explique-t-il. Les premiers développements sont attendues pour la rentrée prochaine.
Régulation (financière et réglementaire) du processus d’intégration universitaire, simplification des procédures d’admission, harmonisation de tous les droits : les motifs de préoccupations sont encore nombreux, comme en témoignent les déclarations des étudiants en soins infirmiers, au sujet des difficultés rencontrées l’été dernier. L’arrivée imminente de six nouvelles formations sur la plate-forme ParcourSup sera scrutée de près, au même titre que la pratique des « frais accessoires » réclamés aux étudiants par certaines universités. L’heure est visiblement à l’optimisme. « Tout devrait rentrer dans l’ordre », assure Stéphane Le Bouler.

Des problématiques connexes

 Valérie Varault

Valérie Varault

D’autres mutations structurelles seront naturellement à considérer, à commencer par l’indispensable intégration de nouveaux métiers et de nouvelles compétences, comme les pratiques avancées. Les ambitions sont clairement affichées : 5 000 IPA devront être formés d’ici à 2022. L’attribution de prérogatives supplémentaires à d’autres professions paramédicales n’est pas non plus à exclure pour améliorer l’accès aux soins, crise de la démographie médicale oblige.
Nouvelle valeur étendard du système de santé français, la coopération interprofessionnelle devra également être orchestrée dès les premiers stades de l’apprentissage, le plus en amont possible des carrières professionnelles. Inauguré le 12 novembre dernier, l’institut de formation des professionnels de santé de Grenoble a choisi de miser sur l’interdisciplinarité pour renforcer les synergies entre les futurs praticiens, via la mutualisation des équipements et l’adoption d’un projet pédagogique commun. D’autres établissements devront suivre cet exemple et s’emparer du sujet, avec l’indispensable soutien des régions. Outre le financement des bâtiments, cet accompagnement pourra prendre différentes formes, comme des appels à projets thématiques. « Nous finançons des séances de formation interdisciplinaire, destinées aux futurs infirmiers et aux internes en médecine, à hauteur de 400 000 euros par an », signale Valérie Varault, chef du service des relations avec les organismes de formations sanitaires et sociales de la région Ile-de-France.
Dernière tendance forte et non des moindres, la transition numérique sera un enjeu majeur. « Il ne faudra pas se contenter de dupliquer le modèle établi sur des supports technologiques. Il faudra penser les usages, de manière pratique et pédagogique. L’université devra montrer l’exemple », conclut Antoine Tesniere. A n’en pas douter, cette révolution réclamera du temps, mais aussi des moyens humains et financiers importants, pour dépasser la simple preuve de concept.

(*) Association nationale des directeurs d’école paramédicale (ANdEP).
(**) Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle – DGESIP.
(***) Université Paris-Est Créteil Val de Marne – UPEC.

NB : Photos et propos recueillis lors des journées annuelles de l’ANdEP, qui se sont tenues les 10 et 11 décembre derniers.

Cotiser plus pour gagner moins, sans pouvoir augmenter les honoraires en conséquence : voici le « contrat » proposé par le gouvernement aux professions paramédicales.

Regroupées au sein du Collectif SOS Retraites*, elles entendent maintenir la pression pour défendre l’autonomie de leur caisse, à la fois bénéficiaire, solidaire et pérenne. Farouchement opposés au régime universel, qui absorberait les crédits en réserve et se solderait par une hausse des cotisations malgré la diminution annoncée de la CSG**, les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes, les pédicures-podologues, les orthophonistes et les orthoptistes n’en n’oublient pas pour autant leurs patients, assurant notamment une coordination minimale des soins dans le cadre d’une grève dite « glissante ». Plusieurs journées d’action sont prévues d’ici au 22 janvier prochain, date à laquelle le projet de loi sera officiellement présenté en Conseil des ministres.

(*) Le Collectif SOS Retraites regroupe une quinzaine de professions libérales, soit environ 700 000 professionnels.
(**) Contribution sociale généralisée – CSG.

Signé le 29 mars dernier, l’avenant 6 à la convention nationale des infirmiers libéraux introduit plusieurs nouveautés au sein de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP).

Certaines d’entre elles sont entrées en vigueur le 1er janvier dernier, à commencer par le bilan de soins infirmiers pour les personnes dépendantes âgées de 90 ans et plus (25 € pour un bilan initial ; 12 € pour un renouvellement). Trois forfaits journaliers sont également instaurés pour les prises en charge légères (13 €), intermédiaires (18,20 €) et lourdes (28,70 €).
Trachéotomie, changement de canule, abdominoplastie, chirurgie mammaire, stripping veineux, stomies : la pose de certains pansements courants a été revalorisée (AMI 3). Du côté des pansements lourds et complexes, trois nouveaux actes ont été créés : bilan initial pour les plaies par épisode de cicatrisation (AMI 11), analgésie topique (AMI 1,1) et pansement avec compression (AMI 1,5). Autres « entrées » remarquées, la création d’une majoration conventionnelle pour les enfants de moins de sept ans (3,15 €) et la création d’un acte d’accompagnement du patient à la téléconsultation, au cours d’un soin infirmier (10 €), dans un lieu dédié (12 €) ou à son domicile (15 €). A l’instar des pharmaciens d’officine, les infirmiers libéraux perçoivent désormais un euro par DMP ouvert.

NB : L’arrêté d’approbation de l’avenant conventionnel sur la pratique avancée a été publié au Journal officiel du 3 janvier 2020 : http://www.andep.fr/ipa-accord-total-sur-la-remuneration/

Mesure phare de l’avenant 6, le bilan de soins infirmiers est officiellement entré en vigueur le 1er janvier dernier.

Il acte notamment la création de trois nouveaux forfaits journaliers pour la prise en charge à domicile d’un patient dépendant, en fonction de critères objectifs (lire notre article à ce propos).

A compter du 1er mai prochain, les infirmiers pourront également facturer certains actes techniques, notamment pour les patients insulino-traités. A noter : ce dispositif, qui se substitue à la démarche de soins infirmiers, fera l’objet d’un bilan initial, qui pourra être renouvelé.  Actuellement réservé aux personnes âgées de 90 ans et plus, il sera élargi à d’autres tranches d’âge dans les années à venir (85 ans et plus – 1er janvier 2021 ; 78 ans et plus – 1er janvier 2022). Il sera même généralisé à toutes les personnes dépendantes le 1er janvier 2023.

Selon l’assurance maladie, le BSI fera progressivement évoluer les conditions de tarification des soins réalisés auprès des patients dépendants, en prenant mieux en compte la quantité de travail de l’infirmier et le niveau de complexité de certaines prises en charge. « Il s’agit d’une évolution majeure qui permettra d’améliorer l’organisation du maintien à domicile, mais aussi de faciliter la coordination avec le médecin prescripteur », souligne la CNAM, qui estime son financement à 102 millions d’euros sur la période 2019-2023.

 

Le coup d’envoi des inscriptions sur la plate-forme ParcourSup est imminent. Dès le 22 janvier, les lycéens de terminale pourront renseigner leurs vœux pour la rentrée prochaine.

Ils auront jusqu’au 2 avril pour confirmer leur demande et compléter leur dossier, en attendant la phase d’admission qui se déroulera entre le 19 mai et le 17 juillet. Pour cette troisième « saison », le dispositif comporte plusieurs avancées. 600 nouvelles formations seront notamment disponibles, à commencer par les différentes études de santé (maïeutique, médecine, odontologie et pharmacie), suppression de la PACES* oblige.

De nouveaux établissements rejoindront également le mouvement, dont les instituts de formation aux professions paramédicales (audioprothésiste, ergothérapeute, orthophoniste, orthoptiste, pédicurie-podologie, psychomotricien). Depuis le 20 décembre dernier, les futurs étudiants peuvent d’ores-et-déjà s’informer sur le fonctionnement de la procédure et le contenu des formations accessibles**.

(*) Première année commune des études de santé – PACES.
(**) Voir : www.parcoursup.fr

Publié le 31 décembre dernier, un arrêté autorise la mise en place d’un protocole de télésurveillance des patients traités pour insuffisance cardiaque par un infirmier.

Prévu par le plan « Ma Santé 2022 », cette initiative doit permettre d’optimiser la prise en charge et le traitement médical pour stabiliser rapidement la maladie, freiner son évolution et réduire sa morbi-mortalité. Dans les faits, les infirmiers diplômés d’Etat pourront se voir déléguer la réalisation de consultations de suivi pour la titration des médicaments de l’insuffisance cardiaque systolique (en présentiel) et la décompensation cardiaque (en présentiel ou en téléconsultation). Ils seront par ailleurs chargés d’opérer une télésurveillance régulière, mais aussi d’orienter les patients vers un médecin, en cas de besoin.

Dans une décision datée du 20 novembre, la HAS avait délivré un avis favorable, sous réserve de procéder à quelques « précisions et modifications » dans le protocole pour « garantir une qualité et une sécurité des soins suffisantes ». En complément du signalement des épisodes aigus et des changements de traitements, elle préconisait notamment d’inclure la réalisation éventuelle de vaccins dans le compte rendu clinique destiné au cardiologue traitant et au médecin généraliste pour « assurer la continuité de la prise en charge ».