Michel Barnier va proposer une grande loi infirmière pour accélérer l’accès aux soins des Français. Malgré cette annonce enthousiasmante pour la profession, le retard accumulé ces derniers mois interroge le calendrier des réformes en cours, dont celle de la formation professionnelle. Explications.

Vingt-six jours après sa nomination à Matignon, Michel Barnier a dévoilé les deux grandes priorités de son gouvernement dans le domaine de la santé, soit la lutte contre les déserts médicaux et la préservation de l’hôpital public. Temps fort de son discours de politique générale, il a confirmé son intention de proposer rapidement une grande loi infirmière : « Ce texte ira plus loin dans la reconnaissance de leur expertise et de leurs compétences, et leur donnera un rôle élargi dans la prise en charge des patients pour accélérer l’accès aux soins. » Une déclaration accueillie avec un enthousiasme non dissimulé par les représentants de la profession. « Nous sommes extrêmement satisfaits de l’écoute et du pragmatisme du Premier ministre face à une situation d’urgence. Cette loi devra impérativement prendre en compte plusieurs aspects, comme les soins relationnels, la coordination des parcours de soins, la prévention et la formation des futures générations d’infirmiers », relève Sylvaine Mazière-Tauran, présidente de l’Ordre national des infirmiers, qui réclame par ailleurs la concrétisation des textes législatifs permettant l’accès direct et la primo-prescription pour les infirmiers en pratique avancée, et un décret autorisant les infirmiers à réaliser des soins spécifiques en matière de plaies et de cicatrisation.

Vers un nouveau report ?

Quel que soit son contenu, cette nouvelle loi ne saurait effacer le retard accumulé ces derniers mois, non sans interroger le calendrier des réformes en cours, dont celle de la formation professionnelle, qui pourrait être une nouvelle fois décalée. Nourrie par des inquiétudes légitimes, l’Association nationale des directeurs d’école paramédicale envisage son report en septembre 2026. « Cette réforme est très importante pour nos étudiants, nos formateurs et notre profession. Les instituts, les universités et les régions doivent prendre le temps de bien faire les choses dans des délais raisonnables », rappelle Florence Girard, sa présidente. Outre la non-publication du référentiel métier, qui constitue une condition sine qua non, plusieurs zones d’ombre devront être rapidement éclaircies, comme la ventilation du nouveau volume horaire d’enseignement théorique et clinique, qui comprend quatre cents heures de plus, la résolution de la problématique des terrains de stage ou encore l’articulation du référentiel de formation avec une autre réforme stratégique pour la filière, celle de l’universitarisation des formations paramédicales. A ce stade du processus, une issue favorable paraît compromise pour la rentrée prochaine.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Officiellement lancée mi-octobre, les campagnes de vaccination contre la grippe et le SARS-CoV-2 seront couplées pour la deuxième année consécutive.

Signe particulier : les recommandations vaccinales sont identiques pour les populations fragiles et soignantes, exception faite des personnes atteintes de troubles psychiatriques, de démence ou de trisomie 21, qui seront uniquement concernées par le vaccin anti-Covid.

Cette double vaccination est naturellement recommandée pour tous ceux qui souhaitent se protéger contre les virus hivernaux dominants, dont les indicateurs épidémiologiques connaissent un certain frémissement, sans toutefois franchir le seuil épidémique.

Autre caractéristique notable : les infirmiers peuvent prescrire et administrer le vaccin contre la grippe aux personnes majeures et aux personnes mineures de onze ans et plus, ciblées ou non par les recommandations. Ils pourront également administrer le vaccin aux moins de dix ans inclus sur prescription médicale.

NB : la première édition de cette campagne de vaccination couplée n’avait pas été un franc succès, avec une couverture vaccinale en baisse ou insuffisante, notamment chez les plus de soixante-cinq ans.


Photo : Stéphanie Hasendahl / Cocktail Santé

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail juge « assez élevé » le risque de voir apparaître des épidémies de maladies transmises par le moustique-tigre dans les cinq prochaines années en France métropolitaine*.

Dengue, Chikungunya, Zika… La probabilité est comprise entre six et sept sur une échelle de neuf. Selon les experts, le système de santé et de surveillance pourrait être mis sous tension. Saisie début août par la DGOS, l’ANSES estime, en revanche, que les impacts seront relativement limités sur l’économie globale, même si certains secteurs comme le tourisme pourraient être fragilisés.

Pour prévenir le risque épidémique, tous virus confondus, l’ANSES recommande notamment de renforcer et d’adapter les moyens matériels, financiers et humains, mais aussi de construire des stratégies de lutte impliquant les acteurs concernés et les citoyens. Selon les dernières données publiées par Santé publique France, le moustique-tigre est désormais présent dans soixante-dix-huit départements métropolitains. 45 % de la population hexagonale réside dans des communes colonisées…

(*) « Moustique-tigre en France hexagonale : risque et impacts d’une arbovirose », ANSES (septembre 2023).


Photo : James Gathany /Wikipédia

La situation est « préoccupante ». Telle est la conclusion de la dernière enquête de l’Association nationale des puéricultrices(teurs) diplômé(e)s et des étudiant(e)s, réalisée au printemps dernier et publiée début octobre.

Le constat est sans appel : la santé financière, mentale et physique des étudiantes de la filière se dégrade dangereusement. Concours d’entrée, financement des études, restauration universitaire… La hausse globale des coûts de formation créent des inégalités et des situations de précarité qui ont des impacts multiples.

Pour absorber cette charge financière, deux étudiantes sur dix doivent exercer une activité professionnelle en marge de leur cursus, non sans accentuer leur fatigue physique ; la formation dure trente-cinq heures par semaine et nécessite au moins dix heures de travail personnel. Autre conséquence néfaste : 60 % des étudiantes rencontrent des difficultés pour accéder aux services médicaux en raison de leur emploi du temps surchargé.

Ce contexte délétère fragilise naturellement leur état psychologique et psychique : 25 % des étudiantes en puériculture disent avoir développé un trouble de santé mentale depuis leur entrée en formation.

NB : 379 personnes ont répondu au questionnaire qui avait été diffusé dans toutes les écoles formant des infirmiers(ères) puériculteurs(trices) ; 99 % des répondants sont des femmes.


Photo : Freepik

La FNESI vient de lancer un jeu en ligne pour aider les étudiants à réviser, via une application mobile gratuite, avec un objectif clairement affiché : rendre l’apprentissage plus ludique et plus interactif.

Pas moins de deux mille questions, réactualisées chaque semaine, sont proposées pour tester ses connaissances, tout en s’amusant. « Que tu sois en début ou en fin d’études, le FN’ESI GAME s’adapte à ton niveau et te permet de gagner des ECTS dans les différentes thématiques des UE qui composent ton cursus », explique la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers, qui espère également lutter contre l’isolement social par le biais de cet outil présenté comme un « tremplin d’entraide entre pairs ».

Selon la FNESI, les premiers retours sont positifs, tant du côté des étudiants que des formateurs, qui recommandent son utilisation. Mise en service début octobre, l’application est disponible sur les plateformes habituelles de téléchargement. Pas moins de quatre mille comptes avaient été créés cinq jours après son lancement officiel.


Illustration : Fnesi

Dans son nouveau rapport d’analyse prospective*, la Haute Autorité de santé propose cinq pistes concrètes pour améliorer la qualité des soins et des accompagnements : une offre en santé de qualité convenablement répartie, une plus forte coordination des acteurs, un élargissement du suivi de l’amélioration de la qualité des parcours en santé, un soutien plus grand en faveur de l’engagement des usagers et un investissement impératif dans la prévention en santé.

Parmi d’autres leviers, la HAS évoque notamment la nécessité de mieux accompagner la reconfiguration des frontières professionnelles et pluriprofessionnelles via des formations, des évaluations et des analyses circonstanciées, que ce soit pour garantir la qualité des nouvelles pratiques ou des exercices coordonnés.

La Haute Autorité de santé plaide également pour une meilleure identification des nouveaux métiers, comme les infirmiers en pratique avancée ou les infirmiers-pivots en cancérologie, qui restent globalement méconnus des patients et des professionnels de santé.

(*) « Améliorer la qualité en santé – Rapport d’analyse prospective », Haute Autorité de santé (octobre 2024).


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Dans son discours de politique générale, prononcé début octobre, le Premier ministre a enfin listé ses priorités dans le domaine de la santé.

Première bonne nouvelle : il compte sur les infirmières et les infirmiers pour accélérer l’accès aux soins des Français. Deuxième bonne nouvelle : il va proposer une « loi qui ira plus loin dans la reconnaissance de leur expertise et de leurs compétences, et leur donnera un rôle élargi dans la prise en charge des patients ». Attendue au printemps dernier, elle avait été brutalement interrompue par la dissolution de l’Assemblée nationale.

Outre le report du décret activités et compétences, qui devait être suivi d’un arrêté fixant les actes réalisables, ce blocage institutionnel a également retardé les travaux sur le nouveau référentiel de formation des étudiants en soins infirmiers, non sans soulever une interrogation majeure : la mise en œuvre de cette réforme essentielle, au regard du retard accumulé, doit-elle être reportée en septembre 2026 ? Autre question critique : les économies demandées aux collectivités, dans le cadre de la rigueur budgétaire, vont-elles pénaliser les instituts de formation paramédicaux ?

Une chose est sûre : l’ANdEP se tient à la disposition du gouvernement et des autorités concernées pour faire avancer tous ces dossiers dans une approche volontariste et constructive.