A la recherche de nouvelles économies, Bruno Lemaire a récemment évoqué la piste des affections de longue durée, dont les modalités de financement pourraient être prochainement réformées. Dans une lettre ouverte, adressée au ministre délégué en charge de la Santé et de la Prévention, vingt-cinq associations de patients lancent un cri d’alerte.
Est-ce la fin de l’Etat Providence ? Le doublement du montant des franchises médicales et des participations forfaitaires des patients, qui doit entrer en vigueur à la fin du mois, ne sera probablement pas la seule entorse au principe de la (relative) gratuité des soins. A la recherche de nouvelles économies pour réduire le déficit des comptes publics, soit dix milliards d’euros dès cette année et douze milliards pour la suivante, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique évoquait récemment une piste pour le moins inattendue. « Comment éviter la dérive sur les dépenses liées aux affections de longue durée, tout en continuant à protéger les patients ? », questionnait Bruno Le Maire, dans une interview accordée début mars au quotidien Le Monde.
Le budget ou la santé ?
Cette simple interrogation a suscité de vives réactions. Et pour cause : cette réforme pourrait concerner 13 millions de Français, dont les soins sont intégralement pris en charge par l’Assurance maladie, exception faite des franchises médicales, des participations forfaitaires, des forfaits hospitaliers et des éventuels dépassements d’honoraires, partiellement ou totalement couverts par les mutuelles en fonction des contrats souscrits par les patients. Alzheimer, diabète, hypertension artérielle… Pas moins de trente maladies chroniques font actuellement partie de ce dispositif solidaire. Enjeu majeur de santé publique, les ALD représentent néanmoins une masse budgétaire importante. Selon le dernier rapport d’évaluation des politiques de Sécurité sociale*, leur coût était estimé à 166,8 milliards d’euros en 2020… soit 66 % des dépenses remboursées par l’Assurance maladie. En hausse constante depuis dix ans, elles pourraient croître dans des proportions importantes, en raison du vieillissement programmée de la population.
Une réponse claire
« Nous refusons d’être désignés à la vindicte populaire comme les responsables des déficits du système de santé, de nous excuser d’être de plus en plus nombreux, d’être de plus en plus malades. Ce n’est pas dans les poches des patients, le maillon le plus fragile de la chaîne, qu’il faut chercher cet argent. » Dans une lettre ouverte, adressée au ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, vingt-cinq associations de patients lancent un cri d’alerte. Les membres de ce collectif redoutent le démantèlement du dispositif ALD, s’inquiètent de ses conséquences sur la prise en charge des malades chroniques et proposent des solutions concrètes pour réduire les dépenses de santé. « La lutte contre la croissance vertigineuse des prix des médicaments, la pertinence des soins, qui permet de soigner mieux et moins cher, ou l’investissement dans la santé publique et la prévention, pour réduire le nombre et l’impact des maladies chroniques, sont des pistes de travail qui nous paraissent plus pertinentes », précisent-elles. A tout le moins, ces vingt-cinq associations réclament l’ouverture d’une réelle consultation « avec et pour » les patients.
(*) « Rapport d’évaluation des politiques de Sécurité sociale – Edition 2023 », Direction de la Sécurité sociale (mai 2023).